MON ALGER TRICOLORE Journal d’une jeure Algéroise

MON ALGER TRICOLORE Journal d'une jeure Algéroise 1940 - 1962

Un récite de Roger SUDRY

Le blocus de BAB EL OUED

Le premier incident se déroule quartier NELSON. A 9h15 une patrouille militaire qui déambule rue Eugène ROBE, le long du marché, est entourée par un groupe de jeunes gens qui narguent les soldats; peu après, des éléments de gendarmerie mobile appelés en renfort bouclent le périmètre. Plusieurs immeubles sont perquisitionnés, des incidents éclatent, une mitrailleuse équipant un half-track de la garde mobile ouvre le feu.

C’est vers les 9h45 que le drame qui allait déchirer BAB EL OUED va survenir. Un GMC à bord duquel se trouvent de jeune recrues est stoppé rue MIZON par un vingtaine d’hommes; alors que le chauffeur voulant démarrer est tué par l’un des manifestants, 2 des occupants du camion ouvrent le feu sur les assaillants … le véhicule est alors arrosé de plusieurs rafales d’armes automatiques: 6 militaires sont tués, 12 blessés dont 3 succomberont à l’hôpital.

Après un retour au calme relatif, une nouvelle fusillade éclate vers les 13h près de la caserne D’ORLEANS et dans le quartier des tournants ROVIGO. Vers les 144, à BAB EL OUED, de nouveaux coups de feu et des rafales de pistolets mitrailleurs éclatent . Immédiatement des automitrailleuses de la garde mobile stationnées aux carrefours ripostent en direction des immeubles. Le quartier est entièrement bouclé par les forces de l’ordre. Des rouleaux de fils de fer barbelés sont tendus d’une extrémité à l’autre des rues donnant accès à ce populaire secteur de la capitale.

Certains carrefours sont tenus par des éléments de L’OAS qui disposent souvent d’armes automatiques. Dès 14h30 le combat gagne en intensité; tout l’ensemble du périmètre est maintenant embrasé. Des civils, des militaires tombent. ..

Avenue général VERNEAU c’est une femme qui est blessée sur son balcon, puis c’est un enfant qui tombe … des sections de militaires, des automitrailleuses de la gendarmerie mobile essayent de progresser dans les rues et tentent de converger vers le centre de BAB EL OUED, ces éléments sont appuyés par des tirs venant des troupes restées en périphérie ; c’est ainsi que du haut des terrasses de la caserne D’EL KETTANI des militaires tirent au fusil mitrailleur et à la MAT sur des immeubles situés 2 à 300 mètres plus loin – ces soldats sont peut être ceux qui nous ont adressé ces bras d’honneur lors des obsèques du capitaine Le PIVAIN.

Les forces de l’ordre ne progressent que très lentement. L’un des plus violents accrochages se produit sur la célèbre place des « 3 HORLOGES » ; il se solde par un tué et de nombreux blessés, tous civils.

Après une accalmie, de nouvelles rafales claquent, des militaires pris sous un feu nourri subissent de lourdes pertes: 1 soldat est tué, plusieurs autres sont blessés. Au milieu du vacarme des explosions, des tirs de bazooka et même d’obus de mortier, les militaires à bords de leurs automitrailleuses progressent en arrosant systématiquement les façades d’immeubles, les terrasses, les volets clos.

Depuis notre balcon, alertés par le fracas des combats, nous observons le ballet aérien des hélicoptères qui survolent BAB EL OUED et d’où sont largués des chapelets de grenades de gaz lacrymogène.

Vers 17h, 2 patrouilles de T6 arrivent en renfort. Nous les voyons piquer – non sans stupeur – sur le quartier encerclé et, de notre poste d’observation, nous percevons très nettement le bruit sourd des rafales de leurs mitrailleuses … nos aviateurs français criblent de balles les toits et les terrasses où se sont réfugiés des civils le plus souvent désarmés …

Extrait du témoignagne de Roger SUDRY

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