Alger- 26 mars 1962

Alger- 26 mars 1962

Récit de Guy PUJANTE

Rue d’Isly – Le Guet-Apens Dimanche 15 mars 20H De Gaulle annonce officiellement la conclusion du cessez-le- feu en Algérie. Il sera effectif le 19 à 12h, et la perspective qui s’ouvre sur l’avènement d’une Algérie indépendante.

Pour mener à son terme le largage de l’Algérie, il modifie par décret l’organisation des pouvoirs publics entre le cessez-le-feu et la proclamation des résultats de l’autodétermination.

Le gouvernement de la République sera représenté par un Haut Commissaire Christian Fouchet – qui rejoindra son poste le 24 mars, assisté de l’éminence grise de l’Elysée Bernard Tricot.

Un exécutif provisoire chargé de la gestion des affaires publiques propres à l’Algérie ainsi qu’une force de l’ordre sont institués. Dés lors l’Algérie n’est plus régie par les lois de la République.

À l’annonce du cessez-le-feu, le général Salan prononce une allocation stigmatisant cette forfaiture et le crime contre l’histoire de notre Nation, et il ajoute :« Je donne l’ordre à nos combattants de harceler toutes les positions ennemies dans les grandes villes d’Algérie ».

Etant donné que les forces de l’ordre n’entrent plus dans les quartiers musulmans, l’OAS signifie aux Préfets de Police d’Alger et d’Oran de ne plus faire entrer les gendarmes mobiles en ville européenne, de faire cesser les bouclages et perquisitions, et menace d’ouvrir le feu si ces dispositions ne sont pas respectées. A Alger, la zone interdite par l’OAS aux forces de l’ordre con[1]cerne le centre ville et plus particulièrement le quartier de Bab-ElOued.

Le 23 mars, c’est l’accident malheureux. Une tentative de désarmement d’une patrouille militaire dégénère ; deux d’entre eux ayant ouvert le feu. La fusillade qui s’ensuit va malheureusement se solder dans l’immédiat par 6 militaires tués et 12 blessés, par le bouclage du quartier- Il ne sera levé que le 29 à 5h du matin -, une furieuse bataille entre assiégés et force de l’ordre employant des moyens lourds (mitrailleuses, canons de 37, bazookas et mortiers, avions mitraillant en rase motte).

En complément des mesures déjà prises pour combattre l’OAS, De Gaulle déclare le 23 mars en Conseil des Ministres : « briser et réprimer par tous les moyens les commandos d’Alger et d’Oran ».

Le 26 mars, un tract demande à la population du Grand Alger « de se réunir au Plateau des Glières pour marcher par les grandes artères sur Bab-El-Oued, en une manifestation de masse, pacifique, en cortège, drapeaux en tête, sans aucune arme et sans aucun en ».

La manifestation est interdite mais tous les barrages établis à l’est et au nord d’Alger ne s’opposent pas au passage des manifestants.

Par contre au niveau du Plateau des Glières, tous les autres accès vers l’ouest sont bouclés par les CRS forçant ainsi les manifestants à se diriger vers la rue d’Isly, seule voie permettant désormais la marche sur Bab-El-Oued.

Plusieurs manifestants ont eu, à ce moment-là l’impression qu’on les dirigeait vers une nasse.

Un long cortége veut donc emprunter la rue d’Isly barrée par 21 tirailleurs, 20 autres sont en deuxième rideau.Les premiers arrivants parlementent avec le jeune lieutenant qui en laisse passer une partie. Des manifestants remarquent que certains de ces militaires portent des casques avec les lettres W 3 peintes en vert.

Plusieurs militaires tentent de prévenir les manifestants du péril imminent. Un jeune soldat français crie à une femme, les larmes aux yeux « Nous, on ne va pas tirer, mais attention, il Y a des F.L.N. dans les sections de tirailleurs ».

Extrait de Pieds – Noirs d’hier et d’aujourd »hui (N°150 – Mars 2007)

Le magazine Culturel et de Loisirs des Français d’Afrique du Nord et de leurs Amis

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